Révélation

Oui, c’est bien le mot. « Révélation ». Le théâtre aura été une révélation. Non pas que je veuille me la jouer artiste incomprise mal coiffée et habillée à la mode hippie-bobo, mais le théâtre a bien été, cette année une révélation pour moi.

Cette année le théâtre ce n’était plus du « faire semblant d’être » ou du « réciter avec un certain ton ». Non. Cette année le théâtre c’est devenu « ressentir », « Vivre ». Cette année j’ai appris à m’apprivoiser, à prendre conscience de ce corps sans souplesse et pétri de complexe. J’ai appris à sortir de la carapace qu’il était devenu, à libérer l’émotion qui était en moi et ce à l’aide d’un mot dit à un mur.

Je me souviendrai longtemps de ce jour où le déclic a eu lieu.

Comme souvent nous étions tous exténués en arrivant au cours de théâtre. Comme toujours nous nous sommes échauffés et il a eu cet « exercice ». Nous étions huit sur scène, chacun devait choisir un mot. J’ai fermé les yeux et posé au hasard mon doigt sur le petit bout de papier. « Larme ». L’exercice commence. Chacun, en regardant le coin gauche de la fenêtre, notre secret, nous devions répéter ce mot. Au début ça me paraissait étrange, voire stupide. Après un certain moment, Mme Bernoussi venait auprès d’un élève, lui demandais de parler plus fort puis le prenait par le bras pour le tirer en arrière et là…Là l’élève sortait tout ce qu’il avait en lui. Il ne disait plus le mot, il l’était. Cet élève était devenu l’Envie, on l’entendait, le voyait dans ses yeux, à son sourire radieux.

« Jamais je ne pourrais… »

Concentration. Elle allait forcément venir chez moi. Oublie. Le mur en face de toi. Larme. Rien d’autre. Une fille semble faire une crise d’angoisse. Peur. Ne te retourne pas. Ne ris pas. Mords-toi la langue. Larme. Une petite boule dans la gorge. Seule. Il n’y a plus rien autour de moi. Le coin gauche en bas de la fenêtre. Larme. Des nœuds dans le ventre. Larme. Les doigts qui se relâchent. Larme. Un petit sanglot. Larme. Ne te laisse pas emporter ! Larme. Ce n’est qu’un petit mot ! Larme. Tout le monde semble être passé. Larme. Elle m’a oublié. Larme. Continue quand même. Larme. Je me sens presque bien. Larme. Je sens qu’on approche. Larme. Quelque chose m’effleure.

Larme

Larme

Larme

« Plus fort » Dit-elle de sa voix douce

Lar……plus rien ne sort. Si. Une larme sur ma joue.

« Aller »

Tu ne vas quand même pas pleurer ! Lar……Mais aller ! C’est stupide !

« Vas-y »

L……La…… Aller ! Renifle. Cette fois tu le sors ce fichu mot. Ferme les yeux. Mes mais tremblent.

LARME.

La main me lâche. Je l’ai dit. Mais. Mais je pleure. Pour de vrai. Je me sens incroyablement bien. Soudain, le retour à la réalité. La scène rouge et bruyante. Les autres. Tout le monde est tourné vers moi.

« Ça va ? »

Les larmes continuent de couler mais il semble que je souris. Oui. Ça va. Je me sens comme vide de toute mauvaise chose.

« C’est l’heure de la pause ».

Rien ne pourrait me faire descendre de mon petit nuage. Même pas le plat de tagliatelles gluantes qui m’attend.

Ce jour-là j’ai compris que ça ne servait à rien d’en faire trop pour ressentir, pour être. Ce jour-là j’ai compris que le théâtre allait changer quelque chose en moi, allait peut être me changer. Tout simplement.

Extrait de mon dossier de l'option théâtre. Je vous en reparlerai bientôt ;)